INTERPRETER
LES TESTS CHU
Article
paru dans Triathlète magazine Numéro 192 - Avril 2003
Bon nombres de triathlètes vont passer des tests sur plateaux médicaux à l'aube de la nouvelle saison, pour fixer leurs zones d'entraînement et voir aussi, si le travail effectué a porté ses fruits, mais ils n'ont pas toujours les connaissances physiologiques ou l'entourage compétent pour la bonne compréhension de leurs résultats.
I - Les tests anthropométriques
Taille,
poids, Indice de masse grasse
Pour évaluer le pourcentage de masse grasse,
plusieurs méthodes de détermination existent,
mais la plus couramment employée est la mesure
des plis cutanés, avec un adiposimètre,
la pince d'Harpenden.
Les quatre plis mesurés sont :
-
la face postérieure du bras (triceps)
- la face antérieure du bras (biceps)
- la région sous-scapulaire au-dessous de la
pointe de l'omoplate.
- La région supra-iliaque au-dessus de la crête
iliaque.
Une formule algorithmique prenant en compte les 4 plis donne le pourcentage de graisse. Cette formule n'avantage pas forcément les triathlètes, car aucun pli n'est pris sur les membres inférieurs, région où habituellement le triathlète est assez ''sec''. (Des triathlètes comme Dave Scott ont été mesurés avec des taux de 5% !)
Cet indice est bien utile pour juger au mieux du poids de forme, car c'est cette masse grasse qu'il faut réduire, et non la masse maigre (fonte musculaire). Ce poids mort agit sur 3 paramètres :
1-
augmentation de la VO2
2- augmentation du coût énergétique
3- augmentation onde de choc (qui augmente le risque
de blessure surtout en cap)
Un
compromis optimal poids/puissance est à trouver,
mais un chiffre trop bas reste dangereux pour le système
immunitaire.
Les femmes, même affûtées, auront
toujours un pourcentage de graisse supérieure
aux hommes.
Des chiffres raisonnables semblent être de l'ordre
de 10% pour les hommes et 15% pour les femmes.
II –- Le test au Spiromètre
Les spiromètres sont utilisés pour évaluer la capacité respiratoire et le volume des poumons, après une expiration forcée totale.
III - Le test triangulaire de VO2max
Protocole
du test
Sur un ergomètre, le triathlète a en principe
le choix entre le tapis de course ou l'ergocycle ; l'ideal
est de toujours effectué le test sur le même
appareil afin de pouvoir comparer chaque test de façon
identique. Cela dépendra également du
passé sportif de l'athlète et des données
qu'il souhaite recueillir. En cas de doute, opter plutôt
pour le tapis roulant.
Le
sujet démarre à une allure d'échauffement
confortable, équipé d'un système
de recueil direct des gaz par la bouche (nez bouché)
et de relevé de fréquence cardiaque, puis
subit une incrémentation de vitesse ou de puissance
à intervalle régulier (propre à
chaque plateau médical).
Exemple 6' à 11km/h puis paliers de 3' progressif
de 2km/h (11-13-15-17-19-21, &) jusqu'à épuisement
total de l'athlète.
A chaque palier, un certain nombre de paramètres
physiologiques sont analysé :
- Fréquence cardiaque
- VO2
- VCO2
- Quotient Respiratoire (QR)
- Taux de lactate (normalement pris au lobe de l'oreille)
- Equivalent respiratoire
- Coût énergétique
Le test dure ainsi de 15' à 20'.
Schéma
du trajet de l'oxygène de l'air aux cellules
musculaires
Notion
de VO2max
Le schéma montre la voie suivie par l'oxygène,
contenu dans l'air, jusqu'aux mitochondries des cellules
musculaires. Plus l'intensité de l'effort augmente,
plus le nombres de fibres recrutées pour assurer
le travail musculaire augmente également. Ceci
induit une augmentation de la fourniture énergétique,
donc une plus grande consommation d'oxygène,
jusqu'à atteinte d'un plateau propre à
chaque individu : la VO2max.
La Vo2max s'exprime, soit en valeur absolue, c'est à
dire en litre/mn ou rapporté au poids corporel,
valeur relative, en ml/mn/kg. On comprend mieux dès
lors l'intérêt d'avoir peu de poids morts
à déplacer lors de l'effort. Et la meilleure
façon d'augmenter VO2max reste encore la perte
de poids.
Grâce à ce schéma, on comprend aisément que les limites individuelles de VO2max peuvent se situer à plusieurs niveau :
-
système ventilatoire
- diffusion alvéole-artère
- système cardiovasculaire
- transport d'O2 par le sang
- diffusion capillaire-cellule musculaire
- mitochondries (taille et nombre)
- type de fibres musculaires (fibres lentes, rapides
ou intermédiaires)
Sans parler d'une technique inefficiente qui ne permettra pas à tous ces systèmes de fonctionner à 100%.
Tableau récapitulatif de coureurs à pied homme et femme de niveau international
Athlètes |
Temps
sur Marathon |
VO2Max
Mesurée |
Joanne Benoit (femme) | 2h24'52'' |
78,6
ml/mn/kg |
Grete Waitz (femme) | 2h25'59'' |
73,0
ml/mn/kg |
Alberto Salazar (homme) | 2h08'13'' |
76,0
ml/mn/kg |
Cavin Woodward (homme) | 2h19'50'' |
74,2
ml/mn/kg |
Derek Clayton (homme) | 2h08'34'' |
69,7
ml/mn/kg |
Frank Shorter (homme) | 2h10'30'' |
71,3
ml/mn/kg |
VCO2
Les déchets produits lors de l'effort sont le
dioxyde de carbone (CO2) et l'eau (H2O).
Le CO2 suit le chemin inverse pris par l'oxygène
pour atteindre les poumons où il sera évacué.
Sa production augmente, elle aussi proportionnellement
à l'effort, et devient encore plus importante
une fois le seuil anaérobie franchi (neutralisation
des ions H+).
Lactates
Même au repos, l'organisme produit des lactates
(taux proche de 1 mmol), mais cela ne pose pas de problème,
car il est tout de suite réoxydé au fur
à mesure de sa production. En revanche, lorsque
l'effort augmente, il existe un seuil d'effort à
partir duquel la production lactique dépasse
les possibilités de réoxydation. Il y
a alors accumulation lactique. On parle alors de seuil
lactique. Les physiologistes ont pendant longtemps considéré
ce seuil à 4 mmol/l mais ils se sont rapidement
aperçus que ce taux était trop arbitraire.
Le taux de lactate est plus ou moins proportionnel à
l'évolution de la vitesse ou de la puissance
jusqu'à créer un point d'inflexion.
Quand on sait que le lactate inhibe quelque peu la glycolyse
aérobie, on comprend l'intérêt de
rechercher cette vitesse critique pour un sportif d'endurance.
Le temps limite à cette vitesse varie suivant
les athlètes, mais on l'estime compris entre
45' et 1h15.
QR
(quotient respiratoire)
Il s'agit du rapport volume de CO2 expiré divisé
par le volume d'O2 inspiré.
QR=VCO2/VO2
Au
repos, le QR est proche de 0,7 c'est à dire que
le volume d'oxygène utilisé par les cellules
est largement supérieur au volume de CO2 rejeté
dans l'air.
A mesure que l'on se rapproche du seuil anaérobie,
le QR a tendance à s'approcher de 1 (c'est une
autre méthode pour déterminer un changement
d'état stable), où seul le glucose et
le glycogène sont utilisés pour assurer
la fourniture d'énergie. Les réserves
de glycogène étant limitées (500
grammes chez un sujet entraîné), on ne
pourra évoluer très longtemps à
ces intensités d'effort.
Exemple du calcul du QR avec une molécule de
glucose
C6H12O6+6O2---->6CO2+6O2+énergie
QR=6CO2/6O2---->QR=1
Quand
le QR est proche de 0,7 l'organisme utilise principalement
ses réserves de lipides, proche de 1, uniquement
le glucose, et vers 0,85 un mélange mixte lipide-glucide
(50%/50%).
Le QR renseigne donc aussi indirectement sur les substrats
énergétiques utilisés par l'organisme.
A la fin du test, le QR est supérieur à 1, qui traduit bien l'état d'acidité de l'organisme.
Equivalent
respiratoire
L'équivalent respiratoire permet de connaître
le volume d'air dans lequel un individu extrait un litre
de (di)oxygène utilisé par son organisme.
L'équivalent respiratoire est le rapport du volume
d'air inspiré (L/min) sur le volume de (di)oxygène
consommé (L/min).
ER = V air inspiré(L/min) / V O2 consommé(L/min)
Fréquence
cardiaque
L'athlète finit son test à Fcmax réel,
où il obtient en principe des valeurs plus hautes
s'il réalise son test sur tapis roulant.
Coût
énergétique
C'est le nombre de calorie ou le volume d'oxygène
qu'il faut utiliser pour parcourir une certaine distance
(1km par exemple).
Vous voilà ainsi un peu mieux armés pour analyser vos tests effectués
en laboratoire.
Bons tests.
Rodolphe Debureau